vendredi 11 novembre 2016

Reçu de Yvette de Andres





Quand vous serez bien vieille, au soir, à la chandelle,
Assise auprès du feu, dévidant et filant,
Direz, chantant mes vers, en vous émerveillant :
Ronsard me célébrait du temps que j’étais belle.

Lors, vous n’aurez servante oyant telle nouvelle,
Déjà sous le labeur à demi sommeillant,
Qui au bruit de mon nom ne s’aille réveillant,
Bénissant votre nom de louange immortelle.

Je serai sous la terre et fantôme sans os :
Par les ombres myrteux je prendrai mon repos :
Vous serez au foyer une vieille accroupie,

Regrettant mon amour et votre fier dédain.
Vivez, si m’en croyez, n’attendez à demain :
Cueillez dès aujourd’hui les roses de la vie.

Pierre de Ronsard, Sonnets pour Hélène
Merci Lutin pour ce joli poème de Pierre de Ronsard, et pour cette mise en page abondamment fleurie ....

jeudi 10 novembre 2016

Reçu de Nadine Deppierraz






A l'enterrement d'une feuille morte
Deux escargots s'en vont
Ils ont la coquille noire
Du crêpe autour des cornes
Ils s'en vont dans le noir
Un très beau soir d'automne

Hélas quand ils arrivent
C'est déjà le printemps
Les feuilles qui étaient mortes
Sont toutes ressuscitées

Et les deux escargots
Sont très désappointés
Mais voilà le soleil
Le soleil qui leur dit
Prenez prenez la peine
La peine de vous asseoir
Prenez un verre de bière
Si le coeur vous en dit
Prenez si ça vous plaît
L'autocar pour Paris
Il partira ce soir
Vous verrez du pays
Mais ne prenez pas le deuil
C'est moi qui vous le dis
Ça noircit le blanc de l'oeil
Et puis ça enlaidit
Les histoires de cercueils
C'est triste et pas joli
Reprenez vos couleurs
Les couleurs de la vie
Alors toutes les bêtes
Les arbres et les plantes
Se mettent à chanter
A chanter à tue-tête
La vraie chanson vivante
La chanson de l'été
Et tout le monde de boire
Tout le monde de trinquer
C'est un très joli soir
Un joli soir d'été
Et les deux escargots
S'en retournent chez eux
Ils s'en vont très émus
Ils s'en vont très heureux
Comme ils ont beaucoup bu
Ils titubent un petit peu
Mais là-haut dans le ciel
La lune veille sur eux.


Jacques Prévert  Paroles

mercredi 9 novembre 2016

Reçu de Miss Yves



« J ’ai tous mes sujets sous la main.
Je vais les voir. Je prends des notes.
Et puis je rentre chez moi.
Et avant de peindre, je réfléchis, je rêve. »
« Il ne s ‘agit pas de peindre la vie, il s’agit de rendre vivante la peinture. »

Pierre Bonnard
Un paysage aléatoire, un ticket d'entrée du musée Bonnard, quelques citations du même, mon tout :
Un superbe mail art de Miss Yves ! Merci à toi ...

Marcelle à plusieurs blogs, en allant sur 




 vous aurez accès à tout ....

lundi 7 novembre 2016

Reçu de Piggy




Le chat somnole
derrière ses yeux clos
les souris voyagent

Henri Brunel

Un chat tampon, des petite souris vigilantes, mais qui n'ont pas à trop s’inquiéter, elles sont seulement dans le rêve du chat ...
Belle illustration d'un bel haïku plein d'humour, d'un auteur zen, qui écrit outre des haïkus des contes zen ....
Merci Piggy  ...

samedi 5 novembre 2016

Reçu de Adriane Leal





Si tu pie se desvía de nuevo,
será cortado.

Si tu mano te lleva
a otro camino
se caerá podrida.

Si me apartas de tu vida
morirás
aunque vivas.

Seguirás muerta o sombra,
andando sin mí por la tierra.

Pablo Neruda  El Desvio

Un superbe mail art, et un poète formidable ( lire et relire " la centaine d'amour "), avec sa traduction en plus ....
Merci Adriane


vendredi 4 novembre 2016

Pour Laurence Rocher




Eh bien, tous ces marins- matelots, capitaines,

Dans leur grand Océan à jamais engloutis…

Partis insoucieux pour leurs courses lointaines,

Sont morts- absolument comme ils étaient partis.

 

Allons ! c’est leur métier ; ils sont morts dans leurs bottes !

Leur boujaron au cœur, tout vifs dans leurs capotes…

- Morts… Merci : la Camarde a pas le pied marin ;

 

- Eux, allons donc : Entiers ! enlevés par la lame,

Ou perdus dans un grain…

 

Un grain… est-ce la mort, ça ? La basse voilure

Battant à travers l’eau ! Ca se dit encombrer

Un coup de mer plombé, puis la haute mâture

Fouettant les flots ras- et ça se dit sombrer.

 

- Sombrer. Sondez ce mot. Votre mort est bien pâle…

- Et pas grand chose à bord, sous la lourde rafale…

Pas grand chose devant le grand sourire amer

Du matelot qui lutte. – Allons donc, de la place ! –

Vieux fantôme éventé, la Mort change de face :

La Mer ! …

 

Noyés ?- Eh ! allons donc ! les noyés sont d’eau douce !

- Coulés ! corps et biens ! Et jusqu’au petit mousse,

Le défi dans les yeux, dans les dents le juron !

A l’écume crachant une chique râlée,

Buvant sans haut-le-cœur la grand’tasse salée

- Comme ils ont bu leur boujaron,-

 

Pas de fond de six pieds, ni rats de cimetière :

Eux, ils vont aux requins ! L’âme d’un matelot,

Au lieu de suinter dans vos pommes de terre,

Respire à chaque flot.

 

- Ecoutez, écoutez la tourmente qui beugle !…

C’est leur anniversaire. – Il revient bien souvent. –

O poète, gardez pour vous vos chants d’aveugle ;

- Eux : le De Profundis que vous corne le vent.

 

- Qu’ils roulent infinis dans les espaces vierges !…

Qu’ils roulent verts et nus,

Sans clous et sans sapin, sans couvercle, sans cierges…

- Laissez-les donc rouler, terriers parvenus !

Tristan Corbière    La Fin 

Pour Pascale Championnet


La femme et son poisson

La vierge et son grillon le lustre et son écume
La bouche et sa couleur la voix et sa couronne.

Man Ray

jeudi 3 novembre 2016

Pour Helga Correa


L'écriture c'est un ange. Un sourire qui cherche la sortie.

Christian Bobin   La grande vie

Pour Dani



La lumière bleue, bleu de tes yeux
Bleu de la mer, bleu de la terre
Bleu du bonheur des jours heureux
Bleu dans mon cœur, bleu de misère

Bleu de la vie, bleu de la nuit
Le bleu du ciel, des étincelles
Un bleu qui vient sans faire de bruit
Bleu de la joie, des ritournelles

Bleu dans mes mains pour un chagrin
Un bleu du roi dans un carrosse
Bleu des espoirs, bleu du matin
Bleu du jupon de Carabosse

Et des flots bleus à l’horizon
Bleu du lilas, de la violette
Une peur bleue pour un frisson
Un bleu lavande, une bluette

Vincent dit Anacreodes

mercredi 2 novembre 2016

Pour Isabelle Obriot



Sous les ifs noirs qui les abritent,
Les hiboux se tiennent rangés,
Ainsi que des dieux étrangers,
Dardant leur oeil rouge. Ils méditent !

Sans remuer, ils se tiendront
Jusqu’à l’heure mélancolique
Où poussant le soleil oblique,
Les ténèbres s’établiront.

Leur attitude au sage enseigne,
Qu’il faut en ce monde qu’il craigne :
Le tumulte et le mouvement.

L’homme ivre d’une ombre qui passe
Porte toujours le châtiment
D’avoir voulu changer de place.

Charles Baudelaire, Les hiboux Les Fleurs du mal

Pour Piggy



"Oh combien je préfère à ce caquet si vain, tout le soir, du silence, - un silence sans fin ;
être assis sans penser, sans désir, sans mémoire......" 


Sainte Beuve

mardi 1 novembre 2016

Pour Nadine Deppierraz



Tandis que les crachats rouges de la mitraille
Sifflent tout le jour par l’infini du ciel bleu ;
Qu’écarlates ou verts, près du Roi qui les raille,
Croulent les bataillons en masse dans le feu ;

Tandis qu’une folie épouvantable broie
Et fait de cent milliers d’hommes un tas fumant ;
– Pauvres morts ! dans l’été, dans l’herbe, dans ta joie,
Nature ! ô toi qui fis ces hommes saintement !…

– Il est un Dieu, qui rit aux nappes damassées
Des autels, à l’encens, aux grands calices d’or ;
Qui dans le bercement des hosannah s’endort,

Et se réveille, quand des mères, ramassées
Dans l’angoisse, et pleurant sous leur vieux bonnet noir,
Lui donnent un gros sou lié dans leur mouchoir !

Arthur Rimbaud   Le mal

Pour Maryse Moussaron




Le couchant dardait ses rayons suprêmes
Et le vent berçait les nénuphars blêmes ;
Les grands nénuphars entre les roseaux
Tristement luisaient sur les calmes eaux.
Moi j'errais tout seul, promenant ma plaie
Au long de l'étang, parmi la saulaie
Où la brume vague évoquait un grand
Fantôme laiteux se désespérant
Et pleurant avec la voix des sarcelles
Qui se rappelaient en battant des ailes
Parmi la saulaie où j'errais tout seul
Promenant ma plaie ; et l'épais linceul
Des ténèbres vint noyer les suprêmes
Rayons du couchant dans ses ondes blêmes
Et les nénuphars, parmi les roseaux,
Les grands nénuphars sur les calmes eaux.

Verlaine  Promenade sentimentale