lundi 31 octobre 2016

Pour Pascale Championnet




Quand nul ne la regarde
  La mer n’est plus la mer,
Elle est ce que nous sommes
  Lorsque nul ne nous voit.
 
  Elle a d’autres  poissons,
  D’autres vagues aussi.
 
  C’est la mer pour la mer
  Et pour ceux qui en rêvent
  Comme je fais ici.
 
  Si nul ne pense à moi
  Je cesse d'exister.


Jules Supervielle       la mer secrète

Le poisson rêve d'été, de fêtes, de vacances ....

Pour Nanou Pradel


Comme les fleurs, les visites agréables nous laissent de merveilleux parfums.
Anne Barratin

samedi 29 octobre 2016

Pour Elena Signori


Oh ! de l'air ! des parfums ! des fleurs pour me nourrir !
Il semble que les fleurs alimentent ma vie ;
Mais elles vont mourir.... Ah ! je leur porte envie :
Mourir jeune, au soleil, Dieu ! que c'est bien mourir !

Pour éteindre une fleur il faut moins qu'un orage :
Moi, je sais qu'une larme effeuille le bonheur.
À la fleur qu'on va fuir qu'importé un long courage ?
Heureuse, elle succombe à son premier malheur !

Roseaux moins fortunés, les vents, dans leur furie,
Vous outragent longtemps sans briser votre sort ;
Ainsi, roseau qui marche en sa gloire flétrie,
L'homme achète longtemps le bienfait de la mort !

Et moi, je veux des fleurs pour appuyer ma vie ;
A leurs frêles parfums j'ai de quoi me nourrir :
Mais elles vont mourir.... Ah ! je leur porte envie ;
Mourir jeune, au soleil, Dieu ! que c'est bien mourir !

Marceline Desbordes-Valmore    Les fleurs

Pour Thérèse Waryn


Ce ne sont pas des mains d'altesse,
De beau prélat quelque peu saint,
Pourtant une délicatesse
Y laisse son galbe succinct. 

Ce ne sont pas des mains d'artiste,
De poète proprement dit,
Mais quelque chose comme triste
En fait comme un groupe en petit ;

Car les mains ont leur caractère,
C'est tout un monde en mouvement
Où le pouce et l'auriculaire
Donnent les pôles de l'aimant

Les météores de la tête
Comme les tempêtes du cœur,
Tout s'y répète et s'y reflète
Par un don logique et vainqueur. 

Ce ne sont pas non plus les palmes
D'un rural ou d'un faubourien ;
Encor leurs grandes lignes calmes
Disent «Travail qui ne doit rien ».

Elles sont maigres, longues, grises,
Phalange large, ongle carré.
Tels en ont aux vitraux d'églises
Les saints sous le rinceau doré, 

Ou tels quelques vieux militaires
Déshabitués des combats
Se rappellent leurs longues guerres
Qu'ils narrent entre haut et bas.

Ce soir elles ont, ces mains sèches,
Sous leurs rares poils hérissés,
Des airs spécialement rêches,
Comme en proie à d'âpres pensers.

Le noir souci qui les agace,
Leur quasi-songe aigre les font
Faire une sinistre grimace
A leur façon, mains qu'elles sont.

J'ai peur à les voir sur la table
Préméditer là, sous mes yeux,
Quelque chose de redoutable,
D'inflexible et de furieux.

La main droite est bien à ma droite,
L'autre à ma gauche, je suis seul.
Les linges dans la chambre étroite
Prennent des aspects de linceul,

Dehors le vent hurle sans trêve,
Le soir descend insidieux...
Ah ! si ce sont des mains de rêve,
Tant mieux, - ou tant pis, - ou tant mieux. 


Paul Verlaine Mains

vendredi 28 octobre 2016

Pour Maho


Tout était écrit, tout était lisible là, sur cette peau
comme sur la peau du monde.

JMG Le Clezio    Terra Amata

Pour Nanou Pradel




Lecteur, as-tu quelquefois respiré
Avec ivresse et lente gourmandise
Ce grain d'encens qui remplit une église,
Ou d'un sachet le musc invétéré ?

Charme profond, magique, dont nous grise
Dans le présent le passé restauré !
Ainsi l'amant sur un corps adoré
Du souvenir cueille la fleur exquise.

De ses cheveux élastiques et lourds,
Vivant sachet, encensoir de l'alcôve,
Une senteur montait, sauvage et fauve,

Et des habits, mousseline ou velours,
Tout imprégnés de sa jeunesse pure,
Se dégageait un parfum de fourrure.

Charles Baudelaire    Le Parfum

jeudi 27 octobre 2016

Pour France Picy



Ses vieux os le torturent depuis des millénaires
Mais il n'est bien que là-haut,
loin des sombres terres,Seul à tournoyer  dans des mouvements
fluides et rapides,dans le ciel bleu
d'azur limpide.

Dominique Sagne

Pour Melissa


Une grue s'estompe
dans le crépuscule et
traine ses ailes comme de la fumée

Sumitaku    Kenshin

mercredi 26 octobre 2016

Pour Corinne Parchantour


Quand j'aurai cent ans, je tracerai une ligne et ce sera la vie ...

Hokusaï

Pour Emmanuelle Villebrun


Chaque matin, au saut du perchoir, le coq regarde si l’autre est toujours là, – et l’autre y est toujours.
Le coq peut se vanter d’avoir battu tous ses rivaux de la terre, – mais l’autre, c’est le rival invincible, hors d’atteinte.
Le coq jette cris sur cris : il appelle, il provoque, il menace, – mais l’autre ne répond qu’à ses heures, et d’abord il ne répond pas.
Le coq fait le beau, gonfle ses plumes, qui ne sont pas mal, celles-ci bleues, et celles-là argentées, – mais l’autre, en plein azur, est éblouissant d’or.
Le coq rassemble ses poules, et marche à leur tête.
Voyez : elles sont à lui ; toutes l’aiment et toutes le craignent, – mais l’autre est adoré des hirondelles.
...
Jules Renard    Le coq

mardi 25 octobre 2016

Pour Adriane Leal


Le vert colibri, le roi des collines,
Voyant la rosée et le soleil clair
Luire dans son nid tissé d'herbes fines,
Comme un frais rayon s'échappe dans l'air.

Il se hâte et vole aux sources voisines
Où les bambous font le bruit de la mer,
Où l'açoka rouge, aux odeurs divines,
S'ouvre et porte au cœur un humide éclair.

Vers la fleur dorée il descend, se pose,
Et boit tant d'amour dans la coupe rose,
Qu'il meurt, ne sachant s'il l'a pu tarir.

Sur ta lèvre pure, ô ma bien-aimée,
Telle aussi mon âme eût voulu mourir
Du premier baiser qui l'a parfumée !

Charles Marie Leconte de Lisle

Pour Pascale


Licorne est dormeuse
et pucelle
et son antre
s’éveille doucement à l’appel des tourmentes.
Était-ce elle, si belle, en ces couches nocturnes,
pudique et réfléchie dans les eaux du sommeil?
Délicats, ses naseaux caressaient les fenêtres
avec de l’oeil de lune dans des rameaux d’argent
et le jardin poussait ses tiges les plus crues
et elle ouvrait son oeil de douce agnelle d’ambre
sur un buisson de rose alerté par les treilles.
La nuit porte sa candeur jusqu’aux naissances des feuilles
dans la douceur des bruits d’abeilles et le vin vivant qu’elle effleure.
Licorne, mordeuse profonde,
tu mastiques dans l’ivoire,
lisse et tournante dans l’espace –
et le temps plane sur ta peau,
presseuse immense du troupeau.

 Jacques Renaud  La licorne, poème venu d'une blancheur médiévale

lundi 24 octobre 2016

Reçu de Gisèle Cribaillet


Sur l'éventail
Je mets le vent venant du mont Fuji.
Voilà le souvenir d'Edo.

Matsuo Basho 

Merci Gisèle pour ce bel haïku si bien illustré ...

Reçu de Jeanne Marie Roch



Pour un art poétique

Prenez un mot, prenez en deux
faites cuire comme des oeufs
prenez un petit bout de sens
puis un grand morceau d’innocence
faites chauffer à petit feu
au petit feu de la technique
versez la sauce énigmatique
saupoudrez de quelques étoiles
poivrez et puis mettez les voiles
Où voulez-vous donc en venir ?
A écrire
Vraiment ? à écrire ?

Raymond Queneau

Dans la série  " Aquarelle " de Jeanne Marie voici la Poésie ..... Merci à toi !

samedi 22 octobre 2016

Reçu de Kerly


U, cycles, vibrements divins des mers virides,
Paix des pâtis semés d'animaux, paix des rides
Que l'alchimie imprime aux grands fronts studieux ;

 A. Rimbaud      Voyelles

Reçu de Kerly


O, suprême Clairon plein des strideurs étranges,
Silences traversés des Mondes et des Anges :
- O l'Oméga, rayon violet de Ses Yeux ! -

  A. Rimbaud      Voyelles

vendredi 21 octobre 2016

jeudi 20 octobre 2016

Reçu de Kerly



A, noir corset velu des mouches éclatantes
Qui bombinent autour des puanteurs cruelles,
Golfes d'ombre

 A. Rimbaud      Voyelles

Reçu de Kerly


A noir, E blanc, I rouge, U vert, O bleu : voyelles,
Je dirai quelque jour vos naissances latentes :
...
Arthur Rimbaud

Un nouvelle série sur " Voyelles " de Rimbaud ...

mercredi 19 octobre 2016

Reçu de Isabelle Obriot



Un buffle se repose dans la rizière
 l'oiseau chante !
L'homme arrive, attelle le buffle. Ils se mettent au travail
 l'oiseau chante !
Le temps passe, le riz pousse, le buffle et l'homme patientent
 l'oiseau chante !
Le riz est mûr. L'homme et le buffle se mettent au travail
 l'oiseau chante !
Quand le riz est récolté, l'oiseau arrive et commence à picorer.
L'homme chasse l'oiseau :" Va-t-en toi qui n'a fait que chanter quand le buffle et moi avons tant travaillé !"
Mais le buffle protège l'oiseau car : " Par son chant, il a allégé notre peine et facilité notre travail,
il mérite donc lui aussi sa part de riz !"

D'après le conte " Le buffle et l'oiseau " de Catherine Zarcate

Un mail art comme je les aime de Isabelle, carton, pages de vieux dictionnaire, feutrines de couleur, avec un joli conte, texte totalement inconnu pour moi ....
Merci Isabelle .

Reçu de Simon Warren


Cliquer sur l'image pour agrandir
 
Thanks Simon

mardi 18 octobre 2016

Reçu de Marcos Souto






Ó Formas alvas, brancas, Formas claras
De luares, de neves, de neblinas!
Ó Formas vagas, fluidas, cristalinas...
Incensos dos turíbulos das aras

Formas do Amor, constelarmante puras,
De Virgens e de Santas vaporosas...
Brilhos errantes, mádidas frescuras
E dolências de lírios e de rosas ...

Indefiníveis músicas supremas,
Harmonias da Cor e do Perfume...
Horas do Ocaso, trêmulas, extremas,
Réquiem do Sol que a Dor da Luz resume...

Visões, salmos e cânticos serenos,
Surdinas de órgãos flébeis, soluçantes...
Dormências de volúpicos venenos
Sutis e suaves, mórbidos, radiantes...

Infinitos espíritos dispersos,
Inefáveis, edênicos, aéreos,
Fecundai o Mistério destes versos
Com a chama ideal de todos os mistérios.

Do Sonho as mais azuis diafaneidades
Que fuljam, que na Estrofe se levantem
E as emoções, todas as castidades
Da alma do Verso, pelos versos cantem.

Que o pólen de ouro dos mais finos astros
Fecunde e inflame a rima clara e ardente...
Que brilhe a correção dos alabastros
Sonoramente, luminosamente.

Forças originais, essência, graça
De carnes de mulher, delicadezas...
Todo esse eflúvio que por ondas passa
Do Éter nas róseas e áureas correntezas...

Cristais diluídos de clarões alacres,
Desejos, vibrações, ânsias, alentos
Fulvas vitórias, triunfamentos acres,
Os mais estranhos estremecimentos...

Flores negras do tédio e flores vagas
De amores vãos, tantálicos, doentios...
Fundas vermelhidões de velhas chagas
Em sangue, abertas, escorrendo em rios...

Tudo! vivo e nervoso e quente e forte,
Nos turbilhões quiméricos do Sonho,
Passe, cantando, ante o perfil medonho
E o tropel cabalístico da Morte...


Cruz e Souza    Antifona 

Thanks Marcos for Poetry and Visual Poetry

Reçu de Adriane















 Le bonheur
Avec la chance
D'être en pleine sève
Le bonheur est un arôme
Volatil qui vous
Embrasse longuement

Claude Lafosse

Une enveloppe "maison", très originale, fermée par un brin de laine tressé, et cette citation de Claude Lafosse ...
A l'intérieur, six superbes ATC

 Merci  Adriane pour ce petit trésor de créativité ...


lundi 17 octobre 2016

Reçu de France Picy







Souvenir vibrant
du violon triste le soir
vestige d'une valse

France Picy


Poème d'origine


Voici venir les temps où vibrant sur sa tige
Chaque fleur s'évapore ainsi qu'un encensoir ;
Les sons et les parfums tournent dans l'air du soir ;
Valse mélancolique et langoureux vertige !

Chaque fleur s'évapore ainsi qu'un encensoir ;
Le violon frémit comme un coeur qu'on afflige ;
Valse mélancolique et langoureux vertige !
Le ciel est triste et beau comme un grand reposoir.

Le violon frémit comme un coeur qu'on afflige,
Un coeur tendre, qui hait le néant vaste et noir !
Le ciel est triste et beau comme un grand reposoir ;
Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige.

Un coeur tendre, qui hait le néant vaste et noir,
Du passé lumineux recueille tout vestige !
Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige...
Ton souvenir en moi luit comme un ostensoir !


Baudelaire Harmonie du soir


 Encore un poème fondu, j'adore
 Merci France

Reçu de Nadine Deppierraz




A l'enterrement d'une feuille morte
Deux escargots s'en vont
Ils ont la coquille noire
Du crêpe autour des cornes
Ils s'en vont dans le noir
Un très beau soir d'automne
Hélas quand ils arrivent
C'est déjà le printemps
Les feuilles qui étaient mortes
Sont toutes ressuscitées

Et les deux escargots
Sont très désappointés
Mais voilà le soleil
Le soleil qui leur dit
Prenez prenez la peine
La peine de vous asseoir
Prenez un verre de bière
Si le coeur vous en dit
Prenez si ça vous plaît
L'autocar pour Paris
Il partira ce soir
Vous verrez du pays
Mais ne prenez pas le deuil
C'est moi qui vous le dis
Ça noircit le blanc de l'oeil
Et puis ça enlaidit
Les histoires de cercueils
C'est triste et pas joli
Reprenez vos couleurs
Les couleurs de la vie
Alors toutes les bêtes
Les arbres et les plantes
Se mettent à chanter
A chanter à tue-tête
La vraie chanson vivante
La chanson de l'été
Et tout le monde de boire
Tout le monde de trinquer
C'est un très joli soir
Un joli soir d'été
Et les deux escargots
S'en retournent chez eux
Ils s'en vont très émus
Ils s'en vont très heureux
Comme ils ont beaucoup bu
Ils titubent un petit peu
Mais là-haut dans le ciel
La lune veille sur eux.

Jacques Prévert 

Un grand merci Nadine pour ce bel envoi, et pour le mot qui l'accompagne ...


samedi 15 octobre 2016

Reçu de Laurence Rocher



Espérons que longs seront les jours
 qui me séparent du jour
qui me séparera de vous.

Guillaume Demuth

Un nouveau cœur de Laurence, comme d'habitude, très travaillé, fond, graphisme, et un poète que je ne connaissais pas, merci Laurence ....

Reçu de Simon Warren

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Thanks Simon

vendredi 14 octobre 2016

Reçu de Pascale


Si tu veux prendre un poisson d'or
Dans l'étang bleu, tu dois d'abord
Lui dire bonjour gentiment
Pendant dix jours assidûment.
Alors il te connaîtra bien
Et bondira vif dans ta main.

Vio Martin
Des cils de poissonne, de la fantaisie dans les écailles, un nouveau M.A. de Pascale, merci à toi ...

Reçu de Elena Signori



L'automne raconte
à la terre les feuilles
qu'elle a prêtées à l'été

Eléna Signori

Merci Elena pour ce M.A. automnal

jeudi 13 octobre 2016

Reçu de Piet Franzen Sidac




Elle me dit : Quelque chose
Me tourmente. Et j'aperçus
Son cou de neige, et, dessus,
Un petit insecte rose.

J'aurais dû - mais, sage ou fou,
A seize ans on est farouche,
Voir le baiser sur sa bouche
Plus que l'insecte à son cou.

On eût dit un coquillage ;
Dos rose et taché de noir.
Les fauvettes pour nous voir
Se penchaient dans le feuillage.

Sa bouche franche était là :
Je me courbai sur la belle,
Et je pris la coccinelle ;
Mais le baiser s'envola.

- Fils, apprends comme on me nomme,
Dit l'insecte du ciel bleu,
Les bêtes sont au bon Dieu,
Mais la bêtise est à l'homme.

Victor Hugo  La Coccinelle

Thanks Piet


Plus d'infos sur : Sidac Studio
 

Reçu de Mélissa






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Une très belle surprise dans ma boîte, un envoi de ma petite fille Mélissa, des poèmes personnels, dont " Le Voyage Fantastique ", joliment calligraphié par ses soins ....

Merci Mélissa pour cette délicate participation ...

mercredi 12 octobre 2016

Reçu de France Picy



Mère des souvenirs, maîtresse des maîtresses,
Ô toi, tous mes plaisirs ! ô toi, tous mes devoirs !
Tu te rappelleras la beauté des caresses,
La douceur du foyer et le charme des soirs,
Mère des souvenirs, maîtresse des maîtresses !

Les soirs illuminés par l'ardeur du charbon,
Et les soirs au balcon, voilés de vapeurs roses.
Que ton sein m'était doux ! que ton coeur m'était bon !
Nous avons dit souvent d'impérissables choses
Les soirs illuminés par l'ardeur du charbon.

Que les soleils sont beaux dans les chaudes soirées !
Que l'espace est profond ! que le coeur est puissant !
En me penchant vers toi, reine des adorées,
Je croyais respirer le parfum de ton sang.
Que les soleils sont beaux dans les chaudes soirées !

La nuit s'épaississait ainsi qu'une cloison,
Et mes yeux dans le noir devinaient tes prunelles,
Et je buvais ton souffle, ô douceur ! ô poison !
Et tes pieds s'endormaient dans mes mains fraternelles.
La nuit s'épaississait ainsi qu'une cloison.

Je sais l'art d'évoquer les minutes heureuses,
Et revis mon passé blotti dans tes genoux.
Car à quoi bon chercher tes beautés langoureuses
Ailleurs qu'en ton cher corps et qu'en ton coeur si doux ?
Je sais l'art d'évoquer les minutes heureuses !

Ces serments, ces parfums, ces baisers infinis,
Renaîtront-il d'un gouffre interdit à nos sondes,
Comme montent au ciel les soleils rajeunis
Après s'être lavés au fond des mers profondes ?

- Ô serments ! ô parfums ! ô baisers infinis !

Charles Baudelaire    Le Balcon


 un M.A. de Florence, un grand merci à toi ..